Premier pas vers la suppression des hydrofluorocarbones,
supergaz à effet de serre


Les hydrofluorocarbures (HFC, ou F-gases pour les anglophones) sont des halogénoalcanes gazeux de la famille des fluorocarbures (FC). Ces gaz fluorés composés d'atomes de carbone, de fluor et d'hydrogène sont notamment utilisés dans les systèmes de réfrigération, des aérosols et la fabrication de mousses isolantes.
Ces gaz, tous d'origine synthétique, tendent à remplacer à la fois les CFC, les chlorofluorocarbures, et les HCFC (hydrochlorofluorocarbures) comme fluides frigorigènes et/ou propulseurs d'aérosols.
En plus de ne pas directement attaquer la couche d'ozone, les HFC ont une efficacité énergétique bien meilleure que les CFC et des propriétés techniques proches de celles des CFC (ininflammabilité ou inflammabilité modérée dans le cas du HFC-152a, faible toxicité et température de fusion permettant de les utiliser comme fluides frigorigènes. Les HFC peuvent remplacer les CFC dans la majorité de leurs applications, tout en réduisant la quantité de gaz nécessaire.
N'attaquant pas directement la couche d'ozone, ils ont été présentés comme une alternative aux CFC, mais leur contribution au réchauffement climatique est néanmoins importante car ils sont de ce point de vue encore 14 000 fois plus puissants que le CO2 (et jusqu'à 23 000 fois pour certains1). En tant que gaz à effet de serre, ils relèvent du Protocole de Kyoto, mais qui n'est d'application obligatoire que pour les pays développés (alors que l'usage des HFC augmente surtout dans les pays tropicaux en développement pour les besoins de réfrigération/climatisation) et dont les ambitions ont été fortement freinées lors du passage à sa seconde phase en 20122.
Leur consommation et ses émissions dans l'air (comme celles d'hydrochlorofluorocarbures3) sont en forte et constante augmentation4,5 depuis la fin des années 1980 (+ 60 % de 1990 à 2012 alors que les émissions de la plupart des autres gaz a effet de serre ont été réduites1). Leur taux de croissance serait de 10 % à 15 % par an au début des années 2010, surtout dans l'automobile et pour l'air conditionné dans les pays en développement (par exemple en Inde, la climatisation représente en 2013 déjà de 40 à 60 % des pics de consommation électrique en saison chaude dans certaines villes)6. Et à ce rythme, la contribution des HFC au forçage radiatif global sera multipliée par trente dans le monde d'ici à 20507,8.

LE MONDE  15.10.2016

Par Clémentine Thiberge
Les Etats signataires du protocole de Montréal ont adopté, le 14 octobre, un amendement visant à éliminer d’ici 2050 les hydrofluorocarbones, puissants gaz à effet de serre.
C’est une nouvelle victoire pour la lutte contre le changement climatique. Les 197 Etats signataires du protocole de Montréal, réunis à Kigali (Rwanda) pour le 28e sommet des parties au protocole, ont négocié, dans la nuit du 14 octobre, les derniers détails d’un accord sur le climat, qui aura mis sept ans à aboutir. L’amendement de Kigali – nom officiel de l’accord – signe aujourd’hui la fin progressive des hydrofluorocarbones (HFC), un gaz à effet de serre 14 000 fois plus puissant que le CO2.
Les réunions ministérielles, qui ont débuté jeudi, se sont déroulées sous haute tension car, selon Clare Perry, une responsable de l’ONG Environmental Investigation Agency, « aucun pays ne veut être responsable de l’échec de la plus grande avancée de l’année 2016 en matière de climat. »
En effet, cet amendement vient se greffer au protocole de Montréal, un des traités environnementaux les plus efficaces jamais négociés. Adopté en 1987 par la communauté internationale, ce protocole a en effet abouti, entre autres, à la suppression définitive des chlorofluorocarbures (CFC), principaux responsables de la destruction de la couche d’ozone.


Des émissions en hausse de 10 % à 15 %
Seul point noir : ce traité a également engendré une explosion de l’utilisation des hydrofluorocarbones. Introduits après le protocole de Montréal comme produits de substitution aux CFC, ces gaz à effet de serre sont employés principalement comme gaz réfrigérants et agents propulseurs dans les aérosols. Selon une étude de l’université de Berkeley, leurs émissions progressent aujourd’hui à un rythme de 10 à 15 %.

L’élimination des HFC est donc désormais un des leviers d’atténuation du changement climatique les plus rapides, disponible à moyen terme. Inclure les HFC dans le protocole de Montréal pourrait en effet permettre d’éviter un rejet de 1,7 gigatonne d’équivalent CO2 d’ici à 2030 – ce qui représente l’équivalent des émissions annuelles du Japon, selon une étude publiée l’an dernier par l’Institut pour la gouvernance et le développement durable (IGSD), un think tank basé à Washington. A plus long terme, la réduction cumulée des émissions mondiales pourrait éviter jusqu’à 0,5 °C de réchauffement à l’échelle mondiale d’ici à 2100, et ainsi permettre de réaliser un quart de l’objectif de 2 °C fixé par l’accord de Paris sur le climat.

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